mardi 10 décembre 2013

FLAMINGO : LA BEAUTE INFINIMENT DOULOUREUSE DES CREATURES DE L’ENTRE-DEUX


Focus sur le travail d'Hector Olguin 

Texte écrit par Elisabeth Richard Berthail
à l'occasion de l’exposition « Flamingo »







Héctor Olguin crée et met en scène un ensemble de personnages excentriques, dont chacun est un morceau de lui-même, un fragment où divers aspects de sa personnalité coexistent. L’identité de l’artiste se déploie ainsi en une nuée de silhouettes incertaines et fébriles, opérant des traversées d’un sexe à l’autre, intégrant le masculin et le féminin, que ce soit sous la forme du travestissement ou de l’androgynie. 
Les images de la série Flamingo exhibent des éléments iconiques que l’on croit aisément saisissables. On y reconnaît des figures mythologiques : Pandore, éblouie par une lumière magique, qui vient d’ouvrir une boîte défendue. Des personnages de fables : Pinocchio, qui avec une songeuse insolence, agite un bouquet de branches mortes devant son visage à demi endormi.
Cependant, chacune de ces figures reste close sur son propre mystère, le regard absent. On retrouve dans leur brûlante immatérialité, l’envol et la légèreté d’un incendie intérieur, qui vient complexifier leur identité.
Cette ambiguïté est renforcée par le fait que les photographies d’Héctor Olguin ne donnent pas l’impression d’une parfaite évidence optique. Sur certains clichés, le corps du modèle n’émerge que difficilement de l’univers vibrant et coloré qui tangue autour de lui. Il devient un corps subtil, composé des liens étendus d’une figure avec son environnement de textures et de tissus chatoyants,  d’accessoires fantaisistes, issus d’un imaginaire grotesque. Chaque personnage se débat pour ne pas se dissoudre complétement dans ce réseau complexe d’impressions visuelles qui excitent le regard de l’observateur. Et l’image est ainsi brouillée par un panache de mouvements, tantôt excités et désordonnés, tantôt langoureux et dansés.
Les travaux précédents – Interzone, Ni pour ni contre, Le Poisson Doré – sont également marqués par la sensibilité au mouvement, qui sur chaque photographie, décompose le champ visuel en zones de ralenti et/ou d’accéléré, créant ainsiun effet hypnotique, une torsion dans l’image qui rend difficile la lecture immédiate de son contenu.

Flamingo décline une nouvelle série de personnages dont le corps grimace, se déforme et se distend - à l’image de la contorsionniste en pantalon rose, les jambes enlacées par deux fantômes. Les poses contraignantes dictées aux modèles nous laissent parfois imaginer qu’un serpent se pavane sur leur corps tordu.
Certaines postures ressemblent à un acte de contrition, ou aux gestes maniérés d’une cérémonie étrange : que font ces deux silhouettes qui dansent autour d’un bouquet de couteaux ? Dans cette mise en scène - plus acerbe - les corps parlent un langage violent de torsions, furieux, presque informe.
La série Flamingo multiplie les saynètes où les personnages semblent pris dans le faisceau de luttes invisibles, aussi violentes qu’elles sont silencieuses, et où s’installe le sentiment de la beauté et de la douleur réunis, participant d’un même dessein. 
D’autres figures, plus inquiétantes, nous donnent la sensation grandissante de voir la mort s’insinuer par allusions dans le rêve étrange qui nous est proposé : un squelette, l’adoratrice d’un démon à cornes, une coupeuse de têtes… La logique onirique qui régit l’ensemble de la série rappelle l’art divinatoire du tarot. Une voyante sans sein penchée sur son tirage achève de nous en convaincre : les personnages de la série Flamingo se situent au seuil d’un autre monde. Ils portent dans les gestes convulsifs qui agitent leurs bras et leurs mains, un univers de présages et d’évocations mystérieuses. La « chorégraphie visuelle » d’Héctor Olguin apparaît alors comme un état proche de la transe : un transport vers une jouissance mystique. Chaîne narrative sans ordre défini d’états d’âmes exaltés, ces images ont une capacité de pénétration esthétique : elles atteignent le cœur comme lieu d’épanouissement.  








samedi 7 décembre 2013

En ce moment à la galerie LA Joaillerie...

Pour le quatrième volet de l'exposition Le Divin (é)Moi, LA Joaillerie invite le photographe Héctor Olguin à exposer sa vision de "La Petite Mort".

Florilège en images.

























"La Petite Mort"
Exposition de photographies d'Héctor Olguin dans le cadre du cycle 
"Le Divin (é)Moi à la galerie LA Joaillerie par MAZLO.
Jusqu'au 28 décembre 2013.

31 rue Guénégaud
75006 Paris

+33 (0)1 53 10 86 04  
contact@la-joaillerie-par-mazlo.fr
M° Odéon, Mabillon, Pont Neuf.


www.la-joaillerie-par-mazlo.fr
www.hectorolguin.com
 

jeudi 10 octobre 2013

ARKETIP NUMÉRO 4 - OCTOBRE 2013 : Entretien avec Antoine Corbineau

1. ENTRETIEN AVEC ANTOINE CORBINEAU

propos recueillis par Céline Robin


Né en 1982, Antoine Corbineau est peintre, graphiste et illustrateur. Il vit et travaille à Nantes.
Il expose ses travaux à la galerie LA Joaillerie, du 29 septembre au 2 novembre, dans le cadre du cycle Le Divin (é)moi autour des pièces uniques de haute joaillerie Mazlo. 


Piscine B, acrylique sur papier, 2013.


Comment êtes-vous devenu peintre ?

J’ai commencé très jeune à suivre des cours de peinture après l’école, sur les conseils d’une institutrice de maternelle qui avait remarqué mon attirance pour le dessin. Je n’ai jamais totalement abandonné durant ma scolarité, j’ai toujours consacré quelques heures par semaine à peindre ou dessiner. J’ai ensuite choisi de poursuivre des études artistiques de manière assez naturelle, mais je n’ai pas orienté mes choix d’options vers la peinture. Je ne me sentais pas capable à cette époque de m’investir exclusivement dans cette direction, et n’imaginais encore que très peu la possibilité d’en faire un métier à ma sortie d’école. Par ailleurs, la peinture n’était pas vraiment le medium le plus facile à défendre dans la section Art de mon école. À l’époque, performances conceptuelles et vidéos trash tenaient le haut du pavé. J’ai donc étudié le graphisme, puis commencé à pratiquer l’illustration de manière professionnelle à ma sortie d’école, tout en continuant à peindre en parallèle et en participant à plusieurs expositions de groupe, encouragé par une galerie à Londres puis à Paris. Ma sélection au Salon de Montrouge et les retours positifs qui s’en sont suivis, m’ont aidé à intensifier ma pratique, que je poursuis maintenant avec la même assiduité que mon travail d’illustrateur.



L'avion de Tchelny, acrylique sur papier, 2013.



Ces dernières années, vous avez acquis une certaine notoriété en tant que graphiste et illustrateur. Quelle place votre oeuvre de peintre tient-elle dans votre activité ?

L’illustration me permet de gagner ma vie et de me laisser suffisamment de temps pour la peinture, qui est une activité clairement plus aventureuse, difficile et solitaire. J’ai un attachement plus profond à la peinture, plus amoureux, tandis que mon attrait pour l’illustration appliquée est certainement plus rationnel et pratique, même si j’y prends beaucoup de plaisir. J’y trouve en tout cas un équilibre et j’aime avancer sur ces deux plans. La séparation entre les deux est très claire dans mon esprit, et dans le même temps, les deux peuvent s’enrichir réciproquement en terme d’inventivité dans les procédés graphiques.


La peinture aurait-elle une fonction méditative ?
 

Probablement, ou plutôt, elle nous plonge dans une forme de méditation, justement par le fait qu’elle n’a pas de fonction évidente. Il ne s’agit que de simples pigments assemblés dans un certain ordre et qui pourtant suscitent tant d’attraction et d’attention. Je pense en réalité que nous avons besoin de la protection de ces images. Chacun cherche, trouve et s’entoure d’images-icônes qui seules sont capables de traverser le temps en restant imperturbables, immuables et vivantes. Je lisais hier la lettre de Marcel Ravidat, premier visiteur des grottes de Lascaux relatant son indescriptible émerveillement lorsqu’il fit la découverte des dessins recouvrant les parois. C’est certainement cela qui fait que l’on continue à peindre. Et que les peintures continuent à être regardées. Il me semble que nous avons eu, de tout temps, besoin de fixer autour de nous de faux reflets du réel, capables d’apaiser nos peurs.


Divisible indivisible, acrylique sur papier, 2012.


Vous employez l’expression « faux reflets du réel ». Plus haut « rendre le miroir magique ». Le peintre et l’artiste en général trouveraient-ils dans leur art un moyen de s’approprier le réel pour enfin, avoir l’illusion de le maîtriser ?


Je ne pense pas qu’il s’agisse de se l’approprier mais plutôt d’essayer d’en révéler des faces insaisissables, comme un miroir sans tain finalement, entre la révélation et le reflet. 



Juhani Pallasmaa dans son livre « La Main qui pense », écrit ceci : « Quand il se manifeste précocement, le sentiment de certitude, de satisfaction ou d’aboutissement peut se révéler catastrophique. Surtout, l’incertitude préserve et stimule la curiosité, et à condition de ne pas verser dans le désespoir ou la dépression, elle constitue un moteur et une source de motivation du processus de création. Le travail de conception consiste toujours à partir à la recherche de l’inconnu, à explorer un territoire étranger. Il faut que le processus lui-même – les gestes des mains qui cherchent – expriment la nature fondamentale de ce voyage d’exploration. » Partagez-vous ce point de vue ?

Tout à fait. J’ajoute que ce n’est pas facile ! Il faut savoir se nourrir de satisfactions de temps à autre, savoir apprécier le travail que l’on a accompli, même si ce n’est que pour quelques instants ou quelques heures. L’état d’incertitude ou d’insatisfaction permanent ne peut pas être un moteur durable.

Vous ne vous reconnaissez donc pas dans la posture de l’artiste romantique, traversé par le doute ou le tourment ?

Non, mais je suis d’accord avec le fait que la précarité de la condition d’artiste, le fait de devoir trouver soi-même une direction à son travail, et qu’il soit très difficile d’en récolter les fruits, puisse plonger dans de très profonds moments de doute, même de tristesse, de découragement. Je pense qu’avoir une seconde activité moins solitaire est dans mon cas une bonne chose, justement pour éviter de baisser les bras, pour être en mouvement plutôt que dans une posture.


Texto, acrylique sur papier, 2013.

Changer d’avis, d’orientation en cours de travail, n’est-ce pas tirer parti de l’accident? Le travail de la main autoriserait-il une forme de lâcher-prise que ne permet pas un travail uniquement conceptuel ?

L’accident n’est pas toujours un problème, mais souvent une issue, en effet. Pas forcément l’accident d’ailleurs, c’est juste le fait de faire avec, d’accepter l’écart qu’il peut y avoir entre ce vers quoi l’esprit voulait aller et ce vers quoi la main emmène. En tout cas, un travail uniquement conceptuel ne saurait accepter cet écart.
 

Y-aurait-il une différence d’approche entre le travail de graphiste/illustrateur et celui de peintre ? Une distinction du même ordre que celle qui existe en artisanat et art ?

L’approche de l’illustration dans mon cas est assez claire, je reçois des commandes, des visuels en référence et une problématique à résoudre visuellement. J’ai un délai et une liste de contraintes à respecter, et plusieurs intervenants avec lesquels je collabore pour réaliser le travail. Généralement le plus rapidement possible ! Ma méthode de travail est donc organisée et mon dessin assez cadré, plus proche de l’artisanat classique. J’ai le devoir de dessiner régulièrement, de pratiquer avec rigueur, d’entretenir mes outils, pour que le produit soit bien réalisé et convienne au besoin du client. La peinture, tout en exigeant des compétences techniques indispensables et une rigueur similaire, donne une liberté totale quant à la démarche et au résultat. Elle autorise l’écart entre les deux, puisque ce que mon pinceau est capable techniquement de transcrire, n’a pas à être et ne peut d’ailleurs pas être l’exacte exécution de mon intention initiale, l’image/idée que j’ai préalablement plus ou moins en tête. A la différence d’un artisan qui fabrique une ceinture en cuir qui doit répondre à une fonction, ma ceinture n’a pas cette obligation. Elle peut mesurer 20 mètres de long. C’est en même temps la difficulté de la tâche. Comme d’avancer au-dessus du vide sur un chemin qui n’est pas préalablement tracé et qui pourrait très bien ne mener nulle part.



L'indienne, acrylique sur papier, 2013.


Si vous deviez vous choisir une famille artistique, quelle serait-elle ?
 
J’aime la force des artistes dits « outsiders », de l’art brut. Justement parce que chacun d’entre eux est un cas particulier. Chacun se nourrit avec les moyens du bord et sans esprit de clan. Parmi les artistes reconnus que j’apprécie beaucoup : Jérome Bosch, David Hockney, Peter Doig, Raymond Pettibon,Tacita Dean, Henry Darger, Ed Ruscha ou encore Stephan Balkenhol, Tony Oursler, Richard Serra, Ange Leccia. 



Est-ce à dire que vous vous considérez comme un peintre autodidacte ? Vous n’avez jamais été sous l’influence d’un maître ?
 

Pas autodidacte puisque j’ai suivi des cours techniques en peinture jusqu’au lycée. En revanche, je n’ai pas suivi de formation purement « beaux arts » par la suite. Par conséquent, je ne possède pas le bagage théorique et référentiel officiel. Ma démarche est donc probablement plus spontanée, sans pour autant être totalement affranchie de toute connaissance technique et conceptuelle. 

Pour autant vous auriez pu être influencé par une figure tutélaire. Ne serait-ce que dans l’élan qui vous a poussé à embrasser cette vocation artistique ? Ce n’est pas le cas ?

Je pense que le contexte de mon enfance a été favorable à la naissance de cette vocation, plus qu’une figure tutélaire en particulier. N’étant pas né dans une famille d’artistes, je pense néanmoins avoir été marqué par les peintures fixées sous verre présentes chez mes parents, venant de l’enfance et adolescence en Afrique de l’ouest de ma mère et de mes grands-parents. Et par des livres et revues sur l’art brut auxquels ma mère était et est certainement toujours abonnée, par les oeuvres de Basquiat, puis par les dessins de Raymond Pettibon à travers des magazines de surf. Ce type de démarche artistique, assez brute, et de reconnaissance m’ont certainement fait envisager plus sérieusement d’aller vers un parcours artistique.


Quelles sont vos sources d’inspiration ? Avez-vous une prédilection pour certains sujets ?
 

Elles sont très diverses, donc difficiles à nommer. Le voyage, qu’il soit réel ou qu’il ait lieu dans les livres que je lis, a sûrement une bonne place. Après l’avoir recomposé de manière très libre, je regarde davantage ce qui m’entoure. Certaines des peintures récentes sont des souvenirs revisités de certains lieux, comme récemment en Russie.



La toile et l'enfant, acrylique sur papier, 2013.


Comment expliquez-vous que vos oeuvres se caractérisent par un espace pictural très souvent saturé ? Comme si le sujet dévorait la toile au point de la dépasser.
 

J’essaie en ce moment au contraire de dé-saturer l’espace, après avoir travaillé pendant plusieurs années sur des compositions très denses. Certaines oeuvres de Bruegel et Bosch me fascinaient pour cela. J’ai souvent en tête la vue d’une fenêtre d’un train en mouvement, et l’idée de pouvoir combiner une succession d’espaces, de scènes, de personnes. En ce moment le train va moins vite, la vue est moins chaotique. Je vois moins de choses mais plus longuement.

Quelle place peut occuper la peinture en tant que medium sur la scène artistique contemporaine ? Quelles sont les voies d’exploration encore possibles et quelles sont celles que vous vous êtes choisies ?
 
Question très complexe ! Il y a semble-t-il une scène, la plus visible en France, pour laquelle l’outil ou le medium sont exclusivement au service de l’intention conceptuelle de l’artiste, principalement sous la forme d’installations. Le résultat est souvent soit un bric-à-brac, soit à l’inverse, un peu rococo ou maniériste dans la réalisation. Mais cela importe peu dans cette forme de démarche où l’idée prévaut. C’est une scène sur laquelle la peinture est très minoritaire. Il me semble que la peinture continue et doit continuer de coexister de manière indépendante, dans une pratique et une élaboration plus individuelle et artisanale, dans laquelle l’exploration se fait dans la limite du médium peinture et de son support. C’est cette humilité dans le choix de l’outil qui me plait. 



Dans votre cas, le processus de création obéit-il à un rituel ? De quelle façon procédez-vous ? Suivez-vous certaines étapes ?

Je ne pense pas que l’on puisse parler de rituel. Je tiens un carnet de croquis, dans lequel je griffonne de manière plus ou moins poussée, parfois en couleur, des idées de compositions. Souvent en me basant sur des scènes ou des situations réelles, parfois mélangées avec des images vues sur internet, des photos, mais aussi des scènes lues dans des livres.



L'homme à l'ordinateur, acrylique sur papier, 2013.






Votre travail semble traversé par certaines obsessions ou leitmotive tels que la cartographie, l’emploi de citations… Pouvez-vous m’en dire davantage sur le rôle de ces éléments dans vos compositions et sur leur origine ?

Pour la cartographie, ou du moins, les vues d’un point élevé, elles sont en effet récurrentes dans mes peintures, mais pas systématiques, ou de moins en moins. Je suis un grand amateur des vues satellites de Google Maps, maintenant à 45° pour certaines villes. J’ai d’ailleurs vu récemment quelques oeuvres récentes de Philippe Cognée, basées sur des vues satellites, très intéressantes. Cette attirance transparaît certainement dans mes choix de compositions, avec l’idée d’oeil qui voyage et qui capture des objets, des morceaux de ville, des êtres humains. J’utilise des phrases et citations sur certains travaux, mais là encore, moins en ce moment. Je m’intéresse beaucoup au décalage qui se crée dans la confrontation d’ une image avec des mots qui ne coïncident pas de prime abord. J’ai cette idée de point de vue en mouvement. Plus récemment, j’essaie d’élaguer et de voir comment créer ce décalage sans employer les mots.


Vous utilisez parfois des paroles de chanson. Existe-t-il un lien entre votre travail sur la peinture et la musique ?

Mes motivations sont certainement les mêmes que celles du musicien composant une chanson. Au-delà du fait que j’ai toujours admiré la capacité incroyable de la musique à toucher son auditoire, immédiatement, j’ai souvent en tête en travaillant, l’idée de faire une peinture comme je composerais un morceau de musique. D’ailleurs également avec le souhait qu’elle puisse vivre en indépendance, tout en étant liée à une série d’autres peintures tout autour, comme un album. L’utilisation que je fais parfois de phrases ou extraits de chansons découle de cela. 

J’aime la confrontation des mots et de la musique autant que celle des mots et des images. J’aime également le cocon que peut former l’espace d’exposition, la galerie, où la sélection d’oeuvres existe comme un microcosme.

Pensez-vous que vous êtes en train d’aborder une nouvelle étape dans votre parcours créatif ? Quelles sont les raisons de ce changement d’orientation ?

 
Certainement. Je crois m’être détaché de certaines habitudes autant que de certaines orientations dans lesquelles je ne trouvais pas d’issue. Cela est probablement dû au fait que je passe maintenant de plus en plus de temps à peindre. Cela me permet d’avancer plus régulièrement, de progresser techniquement et donc d’envisager mes travaux différemment. Je pense que je suis également moins nerveux depuis deux ans. L’expérience du deuil, correspond aussi à ce changement. Il m’a élagué autant qu’il a élagué mon travail, il me semble.
 

La première formule qui me vient à l’esprit en voyant vos œuvres, y compris celles de la toute dernière série du Springboard, c’est « paysage habité ». Les individus semblent à la fois profondément conditionnés par leur « habitus » tout en demeurant apparemment étrangers les uns aux autres. L’interaction semble davantage se situer au niveau de l’environnement matériel qu’au niveau humain. Est-ce une façon pour vous de questionner une certaine forme d’isolement entre individus ?

Probablement. Je m’intéresse beaucoup à la notion d’exil intérieur. L’espace et le temps que l’on peut créer en soi volontairement ou involontairement, les bulles dans lesquelles les individus semblent parfois évoluer. Comme plusieurs univers juxtaposés, qui coexistent sans être liés. Je pense que l’on peut percevoir cela dans mon travail. J’aime aussi ramener les individus dans la nature, aux portes des villes et les poser là comme des pierres, et observer ce qui se passe.



Plus petit splash, acrylique sur papier, 2013.

Vos travaux précédents m’évoquaient un réel fantasmé, recréé. Comme traversé par des visions d’une nature plongée dans le chaos. Une nature qui semblait comme « remontée » contre l’Homme et la menace de son action sur elle. En se recentrant sur des sujets plus isolés, votre travail semble également offrir une image plus apaisée du monde. De la même façon, les vues en plongée qui caractérisaient vos précédents travaux, contribuaient à créer une impression de vision « démiurgique». Comme si vous observiez de loin les créatures qui peuplent la surface de la terre. Aujourd’hui ce point de vue est plus horizontal. Comme une observation réciproque et d’égal à égal. Qu’en dites vous ?

Certainement, je pense que j’avais l’ambition de décrire le chaos dans son ensemble, une sorte d’ambitieuse symphonie décadente et dense, mais je pense qu’il aurait fallu être bien plus sordide et sombre pour cela. Rétrospectivement, il s’agissait à mes yeux d’une fausse route, mais sûrement nécessaire. La réorientation est venue progressivement à mes yeux. Je pense être maintenant plus près du réel, plus chaleureux dans mes intentions. Plus optimiste. Je reviendrai certainement plus tard à ces idées mais différemment.




Vous évoquez l’intériorité, la notion d’espace clos, de bulles et pourtant, paradoxalement, vos personnages évoluent le plus souvent à ciel ouvert. Peu de vues d’intérieurs. Comment l’expliquez-vous ?

Je ne l’explique pas vraiment, c’est un hasard. J’ai d’ailleurs plusieurs croquis d’intérieurs que j’utiliserai bientôt. Je suis cependant plus touché par ce qui se passe dehors, il y a plus de choses à voir, les impressions sont plus variées. Choisir un sujet, une scène, c’est comme le mettre sous cloche pour le laisser se révéler par lui-même. J’aime que les éléments naturels soient présents sous cette cloche. Voilà pourquoi peu de scènes intérieures pour le moment.

J’aimerais une nouvelle fois citer Pallasmaa au sujet du lien qu’il souligne entre le monde et le moi. Il me semble que votre travail trouve une résonance tout à fait pertinente avec ce texte : « Dans le travail de création, l’attention se concentre simultanément sur le monde et sur le moi. Aussi toute oeuvre d’art est-elle fondamentalement une représentation microcosmique du monde et, en même temps, un autoportrait inconscient. Jorge Luis Borges décrit remarquablement cette double perspective : « Un homme se fixe la tâche de dessiner le monde. Tout au long des années, il peuple l’espace d’images de provinces, de royaumes, de montagnes, de golfes, de vaisseaux, de maisons, d’instruments, d’astres, de chevaux et de personnes. Peu avant de mourir, il découvre que ce patient labyrinthe de lignes trace l’image de son visage ». Qu’en pensez-vous ?

 
C’est certainement vrai. Je mets certainement beaucoup de moi involontairement. Je suis heureux que cela puisse faire évoluer mon travail par conséquent. Je vois de manière assez évidente une évolution de mon travail suivant les différents lieux où j’ai habité et où je suis allé, mais je perçois également qu’une partie de cette évolution est structurée par un squelette qui était déjà présent dans mon esprit quand je peignais à l’école, dans mes premiers cours du soir de peinture. Comme si, depuis, je tourne toujours autour de la même intention, en effet probablement comme un autoportrait progressif.


Big bad wolf, acrylique sur papier, 2012.



Vous évoquiez plus haut une « ambition d’ordre spirituelle ». Or le thème de cette exposition s’articule autour de la notion de « Divin ». De quelle façon vous êtes-vous approprié ce thème ? Comment l’avez-vous abordé ?
Une sorte de coïncidence est tombée à point lorsque la proposition d’exposition autour de ce thème m’a été faite. J’ai trouvé intéressant de prendre en compte autant la notion de divin que celle de l’émoi. Mon voyage en Russie m’a semblé tout de suite une bonne circonstance pour nourrir cette réflexion. Le pays tout entier est un espace d’investigation du spirituel, qui cherche ses icônes, en construit de nouvelles, continue à en détruire d’autres. Et le dépaysement que ce voyage a constitué, me donnait la possibilité de souvent voir le réel comme un irréel. Je me suis donc fixé comme objectif de construire cette exposition à partir de cette expérience.

Les oeuvres issues de ce voyage semblent traversées par une atmosphère de douce mélancolie . Est-ce le reflet de votre perception de ce pays ?

 
Certainement, mais c’est un sentiment parmi tant d’autres que j’ai ressentis là-bas. Ce pays laisse aussi émerveillé que perplexe, aussi furieux que nostalgique. Tout sauf indifférent. C’est cet aspect insaisissable qui m’a intéressé dans le cadre des travaux que je montre maintenant.


Pouvez-vous m’en dire davantage sur « Plus petit splash », sur l’histoire de cette œuvre qui manifestement prend sa source dans le « Bigger Splash » de Hockney mais dans une veine plus proche du « champignon atomique ». L’humour n’est pas étranger à votre approche, n’est-ce pas ? Essayez-vous par ce biais de créer des complicités avec le regardeur ?

Dans ce cas, oui tout à fait. Il s’agit d’un clin d’oeil. Mais en général je préfère les titres assez neutres et simples. C’est une exception et un modeste hommage à Hockney dont j’admire le travail autant que le discours. Quant à l’humour dans mon travail en général, là aussi il y a aussi parfois des clins d’oeil, maisj’aime que cela reste dans l’entre-deux. Je pense notamment à « Big bad wolf », une toile sur laquelle est représentée une sorte de courtier new-yorkais visionnaire, avec la phrase « he was the big bad wolf ». Bien que celle-ci soit affirmative et qu’elle puisse être interprétée en rapport au personnage spontanément, on n’en connaît ni l’auteur, ni l’objet. Elle est indépendante de mes opinions et peut finalement avoir plusieurs significations.


Vos œuvres conversent librement, au sein de cette exposition, avec celles de Mazlo. Quels liens pouvez-vous établir entre votre pratique artistique et celle de la joaillerie telle qu’il la conçoit ? Au-delà de la thématique, sur quel plan vos approches respectives se rejoignent-elles ?

Lorsque j’ai vu certaines des oeuvres récentes de M. Mazlo, j’ai tout de suite eu le sentiment que mon angle de travail actuel croisait le sien de manière surprenante. Comme deux bateaux, qui se retrouvent un matin par un incroyable hasard bord à bord au milieu de l’Atlantique. Je pense que nous avons en commun cette volonté de faire confiance aux vertus du lâcher-prise, de faire confiance à la matière et à sa capacité à révéler des signes. C’est plus ou moins cette idée qui pourrait ressortir assez clairement dans mes trois derniers formats carrés, où un personnage semble révéler ou voiler l’espace qu’il occupe.


L'homme à la caravane, acrylique sur papier, 2013.

La fumeuse, acrylique sur papier, 2013.
Le ponton, acrylique sur papier, 2013.




EXPO SOLO Antoine Corbineau dans le cadre du cycle Le Divin (é)moi autour des pièces uniques de haute joaillerie Mazlo.


Exposition jusqu'au 2 novembre 2013.

Du mardi au vendredi de 13h30 à 19h

le samedi de 11h à 19h


La Joaillerie par Mazlo

31, rue Guénégaud

75006 Paris



Merci à tous ceux qui ont pu être présents samedi!
































mardi 1 octobre 2013

ARKETIP NUMÉRO 4 - OCTOBRE 2013

Numéro spécial "Le Divin (é)Moi" - Volet 3


Pour ce troisième volet de l'exposition Le Divin (é)Moi, MAZLO invite le peintre Antoine Corbineau à déployer son "Imaginarium"

 

1. L'IMAGINARIUM D'ANTOINE CORBINEAU


Après le Springboard, première exposition personnelle présentée à Paris en juillet dernier à la galerie LJ, le peintre Antoine Corbineau confirme ses nouvelles orientations de travail. Pour le cycle le Divin (é)Moi, il signe des oeuvres aux accents métaphysiques, mais nimbées cette fois d’une sérénité inédite ... 

 

Illustrateur à la notoriété grandissante, Antoine Corbineau cultive également une oeuvre de peintre même s’il est vrai qu’il lui aura fallu le déclic d’une sélection au Salon de Montrouge en 2011 pour se convaincre d’y consacrer, enfin, le temps et l’énergie
nécessaires.


Son style à la fois foisonnant et immédiatement identifiable ainsi que son goût immodéré pour le genre de la cartographie n’ont d’ailleurs pas manqué d’influencer ses premières oeuvres peintes. Mais au cours de ces trois dernières années, l’artiste s’est peu à peu affranchi de l’artisan, se façonnant un univers pictural original. Un champ d’investigation parallèle, qui tout en se nourrissant de son travail d’illustrateur, le conduit vers des voies encore inexplorées. 

 

Pause près du pont, 2013. Acrylique sur papier. 32 x 24 cm.

 

 Antoine Corbineau n’est pas issu d’une famille d’artistes et c’est tant mieux. Dessinateur précoce, il sacrifie un temps aux figures imposées des cours académiques, puis se libère très vite du carcan de l’art dit « sérieux ». Il renoue ainsi avec une veine débridée et plus spontanée à laquelle l’histoire de sa famille n’est pas étrangère. Biberonné à l’art brut dont sa mère est une amatrice inconditionnelle, il passe son enfance le regard baigné par les oeuvres qui se déploient sur les murs de la maison. De sa famille maternelle, longtemps expatriée en Afrique de l’Ouest, il héritera donc une approche artistique décomplexée.  

Quelques années s’écoulent néanmoins avant qu’il ne mette cette inspiration au service de la peinture. Il choisit d’abord de mener des études de graphisme et d’illustration aux Arts Déco de Strasbourg avant de s’échapper à Londres. Il en revient diplômé du prestigieux Camberwell College of Art.
 

Sous la double casquette d’illustrateur et de graphiste, il trace depuis un parcours sans faute, se taillant peu à peu une place de choix dans le monde de l’imagerie contemporaine. Mais l’envie de peindre le tenaille. Bravant la tendance de l’art contemporain à la dématérialisation, il s’engage sur la voie périlleuse de la peinture, figurative de surcroît… À Londres et Paris, deux galeries observent et soutiennent ses premiers pas de côté vers la peinture, et le poussent à oser une candidature au Salon de  Montrouge en 2011. L’essai sera concluant et son travail largement plébiscité.


UN STYLE EN MUTATION

 
C’était il y a deux ans à peine et pourtant que d’évolution depuis Montrouge. Si les procédés et le style pictural restent inchangés, il est clair que l’artiste opère depuis peu un véritable virage. Probablement délesté de ses démons, il s’est définitivement approprié son medium.

Là où les mots, les superpositions et juxtapositions de plans surlignaient son propos, dans une atmosphère de chaos perpétuel, ne demeure plus que l’épure de l’image, le sujet enfin recentré sur lui-même.

L’espace pictural s’est également réduit. Auparavant saturé de couleurs, de formes, de personnages et de mots, il se fait peau de chagrin, aspirée par son support. Difficile de contempler la fumeuse, l’homme à la caravane ou Piscine B sans penser aux ostraca de l’Égypte antique, ces éclats de calcaire et fragments de poterie sur lesquels scribes et artisans composaient de brillants exercices de dessin sur le vif. Outre la forme de l’îlot de pigments qui rappelle les contours aléatoires de ces fragments, on retrouve le même sens aigu de l’observation, le même humour sous-jacent et l’imagination surtout, qui donne vie aux scènes les plus improbables.

 

 

L'homme au barbecue, 2013. Acrylique sur papier, 53 x 53 cm.

 

Ostracon satyrique: un chat sert et évente un souris.
Égypte/Nouvel Empire / Calcaire / Provenance inconnue ( probablement Deir el-Medina ) / 12.5 x 9 cm

 

LE VOYAGE

 
Bien qu’il ne se revendique d’aucune chapelle, on peut isoler quelques traits saillants et influences majeures au sein de cette oeuvre en devenir.


De prime abord, son approche évoque l’univers d’un Douanier Rousseau. Quand bien même le maître des Naïfs ne compte pas au nombre de ses influences déclarées, Antoine Corbineau partage néanmoins avec cet auguste prédécesseur un même goût pour le voyage et surtout pour les paysages recomposés. Mais en dehors des similarités d’approche, tout sépare les deux peintres.

 


Henri Rousseau, dit le Douanier (1844-1910), La Guerre.
Vers 1894, Huile sur toile. H. 114 ; L. 195 cm
© RMN-Grand Palais (Musée d'Orsay) / DR

 

Chez Antoine Corbineau, la gaucherie, pour assumée qu’elle soit, est d’abord l’empreinte d’un style et d’une intention dont la naïveté apparente est trop affectée pour ne pas trahir le raffinement de la main et de l’esprit à l’oeuvre dans ses compositions. 

De plus, Internet est indéniablement passé par là et avec lui son cortège de vues satellitaires qui imprègnent abondamment les cadrages choisis par l’artiste. En résultent des effets de plongée qui mettent le regardeur dans une position de démiurge.Révélant en filigrane le plaisir d’apprenti sorcier pris par l’artiste qui pose et dispose ses personnages au gré de ses envies dans des paysages fantasmés, histoire de voir « ce qui se passe »...

Cargo, 2013. Acrylique sur papier. 32 x 24 cm.

  

L’IMAGINARIUM

 
Grand admirateur de l’oeuvre de Bosch, Antoine Corbineau reprend également à son compte une certaine liberté avec les conventions de représentation. Aux lois de la perspective, il préfère l’utilisation de lignes de force horizontales qui scandent le fond de ses paysages en grandes bandes colorées, étagées du haut vers le bas.

Glisse dans la baie, 2013. Acrylique sur papier. 32 x 24 cm.



 

Le monde qu’il dépeint est un no man’s land, nourri de souvenirs, de lectures et de rêves. Ce réel recomposé se déploie sous la forme d’une fantasmagorie qui opère en sourdine, au travers de menus détails, presque indécelables mais qui ajoutent soudainement à l’image un contenu décalé, voire saugrenu.  

Émerge alors la conviction que le plus important, le mobile de l’oeuvre, se trouve en dehors d’elle-même. Ce que suggèrent encore les personnages de ses dernières toiles, dont les protagonistes soulèvent le coin d’un voile. 

M. C. Escher, La Cascade. Lithographie, 1961.

 

Manière de suggérer que l’art n’est qu’un leurre ? Un procédé illusionniste dont la fonction consisterait à nous plonger, ne serait ce qu’un instant, dans un monde improbable, peut-être même absurde ? Oscillant entre « l’autre côté du miroir » et les mondes impossibles (La Source rappelle étrangement la cascade d’Escher sous l’oeil de Ledoux), on aurait tort de voir en Antoine Corbineau le héraut de nouvelles utopies.

La source, 2013. Acrylique sur papier. 65 x 50 cm. Collection privée.

Tel le Baron perché d’Italo Calvino, solitaire ermite « qui ne fuyait pas les hommes » et contemplait le monde du haut de son arbre, il porte un regard sans complaisance sur le monde qui l’entoure mais n’y ajoute pas pour autant la pesanteur du jugement. Tout juste s’autorise-t-il à en (sou)rire. Quand Antoine Corbineau déploie sa vision d’un monde à l’envers, c’est d’abord pour mieux en délivrer la charge poétique.


L’ART MAGIQUE

Le caractère majeur des oeuvres d’Antoine Corbineau, c’est finalement l’absence totale de pathos. Individus et objets paraissent simplement posés là, dans l’attente d’un regard bienveillant capable de les déchiffrer. À l’instar de Paul Claudel, pour lequel « l’invention picturale ou la fantasmagorie littéraire permettent de supporter le réel désolé en apportant des compensations magiques », le peintre envisage ses images comme des captures du vivant, manière d’en conserver et d’en sublimer l’aura magique.

 

When I dove off, 2012. Acrylique sur papier. 30 x 40 cm.

Chez Antoine Corbineau, les libertés prises avec les règles de représentation ou avec les déformations perspectives traduisent non pas une incapacité mais une volonté délibérée de créer du décalage et de conserver à l’image sa puissance évocatrice. Après avoir longtemps peuplé ses oeuvres de phrases et de citations, véritables formules incantatoires destinées à créer du (non)sens, il parvient désormais à « parler en images ».


Il renoue ainsi avec la fonction primitive de l’image comme outil conceptuel et délivre sa lecture métaphysique d’un monde perçu comme la scène de toutes les initiations. En disant adieu au chaos qui caractérisait ses premières oeuvres, Antoine Corbineau prouve déjà sa capacité à se renouveler et surtout à réinventer ses pistes de recherche. 

Il est impossible d’évoquer le personnage sans mentionner cette réjouissante humilité  avec laquelle il aborde chaque parcelle de son travail.Peu enclin à la confidence et d’une manière générale assez peu disert sur ses oeuvres, tout juste avoue-t-il son souhait de «mieux faire ». Un sain état d’esprit, fruit de l’exercice périlleux qui consiste à allier art et artisanat sans jamais se perdre.
 

Nullement inféodé au système de l’art contemporain, Antoine Corbineau gagne sa liberté d’artiste en flirtant avec les compromis et en adoptant la stratégie de l’homme avisé. Il a ainsi intégré à son univers d’artiste tout le bien que le travail exigeant de l’illustration pouvait apporter. Là où le pacte aurait pu produire un dénouement faustien, il est au contraire à l’origine d’un balancement, d’une respiration.


Ce positionnement courageux devrait en inspirer plus d’un, tant il est difficile de naviguer entre art et savoir-faire sans subir l’opprobre de l’un ou de l’autre des deux camps...